Histoire du lavoir et du jeune garçon ⛲


Toujours jeune, plein de talents et d’envie malgré ses problèmes de santé, notre poète anticonformiste nous raconte une histoire et pas n’importe laquelle. Celle de son enfance chez ses grands-parents Reneimois du Moulin de Roffray, qui se poursuit encore aujourd’hui avec la défense de son « île au milieu de la verdure ». Georges Marguin a su convaincre quelques élus et beaucoup de bénévoles, qu’il tient à remercier et à encourager avec son histoire et ses bons mots …

De retour de la guerre, notre grand-père a acheté le moulin désaffecté dit : Moulin de Roffray. Pour sa position et surtout pour l’eau, parce qu’avec les bâtiments, était compris le bief alimentant le lavoir, le tout ne formant qu’un ensemble jusqu’au déversoir. Après le déversoir, le bief appartenait à un autre moulin situé en aval, mais nous étions entourés d’eau.

Installés au moulin, notre grand-père s’occupait de sa vigne pendant que la grand-mère faisait la ferme avec quinze chèvres et une importante basse- cour, poules, oies et surtout canards, basse-cour qu’elle lâchait « à la bade » dans la nature tôt le matin, le bief faisant le bonheur des canards.

Mais il y avait aussi le lavoir, un lavoir qui ressemblait à une île au milieu de cette verdure et de toute cette eau qui coulait en abondance faisant le tour des bâtiments.

A sept ans en 1934, je venais en vacances chez les grands-parents, ce qui était pour moi plus qu’un bonheur, grâce au lavoir. En effet chaque jour était dévolu à deux ou trois lavandières, qui sachant que j’étais là, m’apportaient qui une barre de simple chocolat, qui, deux carrés de chocolat au lait, si c’était un lundi, une m’apportait une petite part du gâteau qu’elle avait confectionné le dimanche et c’était ainsi tous les jours de la semaine pendant toutes mes vacances. 

Il y avait aussi l’arrivée des lavandières, vers neuf heures, certaines arrivaient seules avec un attelage cheval et char à bancs, les autres se faisaient amener par leur mari qui allait travailler dans ses vignes et qui revenait à onze heures chercher le linge rincé à l’eau claire du bief dont le débit était important ainsi que l’épouse bien entendu. Un bief qui avait en son sein, une multitude de petits poissons et aussi des truites ainsi que surtout beaucoup, beaucoup de têtards, les accotements étant habités par les crapauds. L’eau était tellement claire que je me mirais dedans.


Les lavandières venaient rincer leur linge le matin, et le soir en rentrant de sa vigne, mon grand-père bénévolement et naturellement, nettoyait le bassin du lavoir avec un balai de bouleau, c’était ainsi tous les jours. Quand aux  extérieurs, entre la basse-cour de la grand-mère, les chevaux des attelages, les troupeaux de passage, et les chèvres maison, il n’y avait pas besoin de cantonnier pour entretenir et les abords du lavoir et les accotements et le fossé, pas plus que les haies qui étaient taillées au cordeau par les chèvres tout au long du chemin depuis la D20, jusqu’au  fond du Gandoger ou aux rives de la Vauxonne. 

C’était ainsi, aucune main d'œuvre humaine, uniquement animale pour tenir une campagne propre.
  • 1951 décès de la grand-mère, plus ni oies ni chèvres pour entretenir les abords du lavoir.
  • 1953 décès du grand-père. Je travaille à Lyon, nous habitons Belleville, très mal logés, mais logés.
  • 1953 toujours, à Lyon rencontre d’un industriel qui m’offre un emploi avec un salaire confortable, plus un logement de fonction, une villa dans le quartier résidentiel ajoute-il en souriant, ce, à Chauffailles avec un emploi pour ma femme ; soit à 50Km de St Georges, nous qui visions Paris nous acceptons. Nous achetons une voiture et tous les vendredis soirs nous sommes au moulin, ce qui fait que tous les samedis matin on pouvait me voir faux en mains, faucher l’herbe des abords du lavoir.
  • 1970, pratiquement plus de lavandières, le lave linge a fait des trous chez elles, il en reste deux, Mesdames Dumont et Farget, deux irréductibles qui viennent pratiquement tous les jours sur leur Solex, rincer quelques bricoles. Elles tiendront encore deux ans, jusqu’en 1972. Puis elles ne viendront plus ; laquelle des deux a été la dernière ? Je ne le sais pas. Je pense plutôt à Mme Farget.
Mais le lavoir vieillit, il a besoin de grosses réparations. Il faudra attendre 1998 que le maire de l’époque, Jean Louis Bellaton, médecin émérite de son état, amoureux des vieilles pierres et respectueux du passé, ne fasse faire ces réparations par l’entreprise Lefort. Murs, toiture, sol, escalier, tout a été remis à neuf. Un grand merci monsieur le maire honoraire, sans vous le dernier lavoir communal ne serait plus, ou j’aurais peut-être créé une association de fait, ce qui me tente actuellement. 

Effectivement que n’ai-je pas entendu comme critiques, presque autant que pour l’achat du château Montchervet par un des prédécesseurs de Jean Louis Bellaton.


Et j’ai continué à entretenir les abords en demandant toutefois de l’aide au maire actuel qui riait qu’on s’occupe d’un lavoir. En réunion, il m’avait même baptisé “Papy du lavoir”,  ce qui avait fait rire toute la salle. On bosse bénévolement et en plus on se fout de votre binette au lieu de vous remercier, il faut le faire. Quand je pense que le maire de Cercié a déjà budgétisé la réfection du sien pour 2024 alors qu’il est très présentable ... mais passons. 

Une année, même, non content d’entretenir, entièrement « mon » lavoir, je l’avais fleuri à mes frais. Mais comme j’avais mis de l’Asparagus, des innocents sont venus me trouver pour me signaler que dans mes fleurs, il y avait de l’ambroisie. Il faut dire que si je l’avais fleuri à mes frais, c’est parce que je réclamais un geste de la mairie, que je j’imaginais ce lavoir entouré de fleurs comme tous ceux du Beaujolais et je rêvais d’un banc pour les promeneurs dominicaux. Hélas jamais un résultat ; un lavoir ? Connais pas et Jean Louis Bellaton l’a tout fait restaurer était la réponse. Point. 

Alors Papy du lavoir continuait bénévolement son petit boulot d’entretien. Jusqu’en 2022 où toujours bénévolement mon voisin Lionel Nicol a pris la relève. C’est lui aujourd’hui qui vient couper l’herbe et nettoyer le bassin assez régulièrement. Je dois tout de même avouer que tous les printemps, la commune fait faire un nettoyage complet par un cantonnier et c’est fait pour jusqu’à l’année suivante. Quinze jours après son passage, tout a repoussé.

 


Dimanche 22 mai 2022, le banc a été inauguré en présence de "Mr le Maire de Roffray" et de nombreux amis, dont le voisin Lionel Nicol (en haut à droite)

Effectivement il y avait un banc au lavoir, une œuvre signée Christian Dugelay que je ne remercierai jamais assez. Enfin un adjoint qui comme Jean-Louis Bellaton s’intéresse au patrimoine. Et non seulement il a fait installer un banc, mais en 2023 il a envoyé par trois fois un cantonnier, du jamais vu. Encore merci.

Mars 2023 ; une bande de petits crétins a cru bon de taguer le lavoir. Une horreur !

En mars 2023, le lavoir a été tagué et le policier municipal prévenu a alerté les élus ...

Que faire ?  Sachant les services techniques débordés, il n’y a qu'à voir dans quel état sont les fossés et les accotements pour s’en convaincre, comme toujours, faire appel à des bénévoles. Et ils sont venus rapidement, en force et bien équipés, Karcher, brosses, balais, pinceaux,  etc. 

Bernard Marquet, organisateur s’il en est, a sonné le rassemblement de sa section informatique et ceux qui n’étaient pas présents avaient vraiment un motif. Mais d’autres bénévoles sont venus aussi, de Marsangues, du Larion, du centre-bourg, de port Rivière, du Badu, du Cartelet etc, un est même venu de Montmerle, des inconnus pour la plupart, mais des amoureux des lavoirs qui ont fait connaissance et aujourd’hui sont copains. 

Laurent Servigne, Jean-Claude Gaillard et Bernard Marquet le 5 juillet 2023

Laurent Servigne ayant fourni gracieusement la peinture spéciale “anti-tag” très chère, tout fut effacé en un tour de main, dans la joie et la bonne humeur.  

Vive le bénévolat !

Quelques-uns des bénévoles du jour ont rejoint la nouvelle association "Saint-Georges Patrimoine"

Mais si le lavoir est « dé tagué », le travail n’est pas terminé

Il va falloir reprendre les seaux de peinture, les pinceaux et rappeler les bénévoles assez rapidement, à moins que les services techniques de la commune ou une entreprise s’en chargent, ou que l'affaire reste en suspens ce qui m’étonnerait et personnellement je ne le souhaite pas. Cela enlèverait beaucoup de charme, de convivialité et d’ambiance, ce ne serait plus le lavoir de tout un chacun, car il aurait perdu son âme. Son âme étant le bénévolat. D’ailleurs dans la France entière les lavoirs sont gérés et entretenus par des bénévoles qui fournissent la main d'œuvre et la commune les matériaux nécessaires.

Si tu critiques un bénévole, sois sûr d’être capable de le remplacer. 

Les bénévoles offrent gratuitement leur temps et leur énergie et en aucun cas ne sont indemnisés. Leurs seuls salaires sont votre respect, votre reconnaissance et vos remerciements.
L’ami incontournable des bénévoles ? Les réseaux sociaux. Qu’on se le dise !

Tout ce Laïus pour prouver que le lavoir de Roffray a toujours été entretenu par des bénévoles, animaux malgré eux et humains. Mis à part Jean-Louis Bellaton qui lui y est allé du fond du cœur. Et il n’y a aucune raison pour que ça s’arrête.

Encore une fois : Vive le bénévolat !

“PAPY du LAVOIR”, Georges Marguin, le 27 août 2023.

Nota Bene : 

Mes oreilles m’ont dit que Christian Dugelay n’était pas content de ne pas avoir été invité à l’inauguration du banc dont il est le père. La raison est simple, seuls étaient invités les bénévoles, que nous avons d’ailleurs tous retrouvés au « détagage ». Un adjoint étant indemnisé est considéré salarié de la commune et ne peut donc pas participer. A mon grand regret.

Esquisse de Jean-Claude Gaillard (artiste Reneimois) qui pourrait figurer à l’intérieur du lavoir

Le lavoir du Roffray a été identifié sur le site internet des Lavoirs de France https://www.lavoirs.org - Vous pouvez le localiser sur le plan du Blog citoyen de St Georges en cliquant ici

Cette photo du Lavoir fleuri et celle en haut de l’article sont l’œuvre de Stéphane Bessard

Le 19 septembre 2023, quelques membres de Saint-Georges Patrimoine ont peint une sous couche ...

Le 26 septembre 2023, Lionel Nicol est venu tondre les abords. Merci et Bravo à lui !



Commentaires

  1. MONIQUE RUET27/08/2023 13:39

    Belle histoire ! Prenez soin de vous !

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  2. Christine Muzet28/08/2023 11:50

    Toujours un plaisir de vous lire Monsieur Marguin et d'en apprendre un peu plus sur l'histoire de ce lavoir qui vous tient tant à cœur. A très bientôt !

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  3. Marquet Bernard28/08/2023 15:35

    En se mettant aux services de ses contemporains
    Voici la profession de foi du bénévole

    Vivre en soi ce n’est rien, il faut vivre en autrui.
    A qui puis-je être utile agréable aujourd’hui.
    Voici chaque matin ce qu’on devrait se dire
    Et le soir quand des cieux la clarté se retire.
    Heureux à qui son cœur aura tout bas répondu.
    Ce jour qui va finir je ne l’ai pas perdu.
    Grace à mes soins j’ai vu sur une face humaine.
    Les traces d’un plaisir 😊 ou l’oubli d’une peine

    Mes respects à Monsieur Marguin pour nous avoir relaté la longue vie du LAVOIR de Rofray.

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  4. Bonjour à tous les amoureux du lavoir, de la Vie.
    Hé oui, je l aime ce lavoir !! C est le mien, c est le nôtre à tous. Notre patrimoine a du sens, le sens de la Vie et je remercie tous les bénévoles pour leur travail et leur soutien.
    Merveilleux texte que l Histoire de ce lavoir relatée par cette belle âme en la personne de Mr Marguin. C est aussi ça la transmission: faire en sorte que les choses, les personnes durent et perdurent au fil du temps, au fil de l eau.
    Prenons soin de nos belles âmes afin que notre Histoire soit plus douce.

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  5. Beau témoignage Mr Marguin, qui souligne l'importance du lien social et également la transmission du patrimoine. Josiane Pierrefeu

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  6. BERNARD Jocelyne24/09/2023 13:53

    Merci à vous toutes et tous qui oeuvrez bénévolement pour la sauvegarde du patrimoine de la commune.

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