Des référents de quartiers aux illusions perdues

Honoré de Balzac a magnifiquement inspiré le cinéaste Xavier Giannoli, comme il invite le comité de rédaction du Blog de St Georges à sortir quelque peu de sa réserve. Cette comédie humaine vouée aux faux-semblants, nous rappelle les tentatives de démocratie participative à St Georges. Après l’étude avortée de la réhabilitation du foyer municipal, voici les réunions de quartier qui avancent masquées. Scène de vie démocratique à St Georges, bon film et bonne lecture à vous.

Des référents de quartiers à St Georges, du fond à la forme

Le 15 janvier 2021, sur la page Facebook de la mairie, l’adjoint au Maire chargé de la communication, annonçait : « Nous allons aussi en principe ré organiser des réunions de quartier pour informer les habitants de l’avancement des projets. Cela a déjà été fait et sera refait. Prochainement aussi, des référents de quartier (2 ou 3 élus, ex-élus et non élus par quartier) vont être nommés par la commune pour servir de lien entre les habitants et la commune ».

Dans une interview au Progrès du 30 août 2021, ce même adjoint lançait “Le grand nombre de volontaires démontre l'engouement et le besoin de la population”. Autant il est vrai que l’attente des Reneimois est grande, autant il est faux d’affirmer qu’ils ont pu se présenter comme volontaires, puisque aucun appel à candidature n’a été formulé officiellement. Nous verrons tout à l'heure comment ils ont été désignés, à une exception près ...

En septembre 2021, le St Georges infos confirmait cette intention louable en écrivant : “Conformément à la promesse électorale et dans un souci de communication, de transparence et de volonté de faire participer les habitants au développement de la commune, début septembre, la mission du référent de quartier va débuter”.

On découvrait dans ce même St Georges infos le découpage des quartiers décidé par monsieur le Maire, ainsi que la liste exhaustive des référents de quartier, dont les membres non élus, également intronisés par monsieur le Maire. 9 quartiers pour 43 référents de quartiers (dont 18 membres élus du conseil municipal). La liste exhaustive est consultable sur le site de la mairie.
Le même document apportait également quelques précisions sur les domaines dans lesquels chaque référent de quartier était chargé de collecter et de diffuser des informations, à savoir : 

• Les dégradations ou incivilités ;
• l’entretien des espaces publics ;
• la propreté et l’embellissement ;
• les problèmes de stationnement et de circulation ;
• les travaux, éclairages publics et aménagements de la voirie.

Dans cette action, qualifiée de « participation des habitants au développement de la commune »,  l’exécutif de la commune s’engageait également à :

• Informer systématiquement les référents de l’évolution et des suites d’un dossier soumis par l’un d’entre eux ;
• Mettre en place une adresse e-mail unique dédiée pour les référents de quartiers ;
• Informer les administrés de la désignation ou de l’élection (sic !) des référents de quartiers ;
  
• Diffuser la charte signée par leurs représentants.

Sur le fond, toutes ces intentions sont tout à fait louables. Elles pourraient nourrir des voies de participation citoyenne au développement de la commune et accélérer la résolution des nombreux problèmes rencontrés par nos habitants depuis tant d’années.

Notons toutefois qu’alors que les référents ont été désignés (donc sans procédure d’élection), ils n’ont pu s’engager à signer une charte qui à notre connaissance n’existe pas ou si elle existe reste secrète ! Les conditions préalables qui avaient été imposées par monsieur le maire aux membres participant au groupe citoyen sur l’avenir du foyer municipal, étaient bien plus draconiennes ! Deux poids et deux mesures pourquoi ?

Dans la lignée de ces premières constatations, le premier bilan que nous tirons, deux mois après le lancement de ce projet, nous conduit malheureusement à être très circonspects sur les réelles intentions de notre exécutif sur ce dossier. La forme n’est pas au rendez-vous du fond.

Une désignation des référents au sein de la Cour !

Dans les communes de plus de 80 000 habitants le périmètre des quartiers est fixé par le conseil municipal et chaque quartier est affecté d’un conseil de quartier dont le conseil municipal fixe la composition et les modalités de fonctionnement. La législation a laissé libre cours aux communes de moins de 80 000 habitants, comme St Georges, pour mettre en place également ces comités de quartier.

Si c’est le conseil municipal qui détient la liberté de définir le périmètre ainsi que les modalités de composition et de fonctionnement des conseils de quartier, force est de constater que ce sujet n’a jamais fait l’objet ni d’un ordre du jour, ni d’une simple information lors des conseils municipaux qui se sont tenus depuis la réélection de monsieur le Maire. 

C’est donc sous sa seule décision que le découpage des quartiers comme la désignation des référents non-élus ont été effectués. Dans l’ombre, la procédure laisse une fois de plus toute liberté à l’apriorisme, au favoritisme, au réseau et aux conflits d’intérêts. 

En dehors de ces désignations arbitraires, une seule personne qui avait fait connaître son intérêt par écrit directement à la Mairie a été retenue. Un autre de nos lecteurs nous a informés qu’il avait aussi manifesté son intention de participer, mais le Maire ne l’a pas retenu pour des raisons obscures. Une réunion avec tous les référents désignés, se serait tenue en juillet dans la salle du conseil municipal ...

Par ailleurs, il est aisé d’identifier parmi les non-élus, les nombreux sympathisants, amis, parents ou « affiliés » ! 

Des réunions de quartiers à huis clos

Au-delà, si les référents de quartiers sont désormais bel et bien désignés, aucune publicité sur une quelconque réunion de quartier n’a à ce jour été effectuée en bonne et due forme auprès des habitants concernés. La réunion organisée sur le projet d’aménagement du quartier de la gare le 4 octobre 2021, et dont on a eu grande publicité sur le récent blog de la commune, n’a fait l’objet d’aucune publicité au préalable. Au vu des photos et de la surprise manifestée par de nombreux habitants du quartier non conviés, seul un public trié sur le volet y fut « invité ». 

Il est aisé d’obtenir un consensus et d’éviter les critiques lorsque l’on cible les sensibilités plutôt favorables à l’exécutif. Le meilleur moyen d’obtenir une majorité n’est-il pas de bâillonner ceux qui risqueraient de manifester quelque critique ne serait-ce que constructive ?

Pire encore, interrogé lors du forum des associations sur des rumeurs de réunion d’un groupe de référents pour un quartier, notre adjoint au Maire chargé de la communication nous apprenait en live que les référents en question se réunissent en fait « entre-eux » pour sélectionner et décider des actions à mener dans le quartier qui est sous leur responsabilité !

Que devient la remontée de l’information issue des habitants du quartier qui eux vivent au quotidien les problèmes ?  Les référents non élus désignés auraient-ils à eux seuls la prétention de connaître tous les problèmes vécus par leurs habitants ? N’ont-ils pour mission que de faire remonter leurs propres problèmes ? Nous retrouvons ici encore le même état d’esprit que celui qui a consisté à refuser, après l’avoir proposé en réunion publique, de soumettre à référendum local l’avenir du foyer municipal.

Nous avons un réel problème de démocratie à St Georges et comme le disait Nicolas Machiavel : « La meilleure forteresse des tyrans c’est l’inertie des peuples » !

Des signes extérieurs de démocratie aux illusions perdues

La procédure mise en place par la commune nous interroge à plusieurs niveaux. 

Notre exécutif souhaite-t-il vraiment mettre en place des structures participatives que sont les véritables comités de quartiers ? S’agit-il simplement de se livrer épisodiquement et au rythme souhaité par monsieur le maire à des visites de quartier sur des sujets prédéfinis par le maire et  accessibles sur invitations seulement ? Faudra t-il attendre la prochaine échéance électorale pour voir fleurir ces réunions de quartier ?

Comment les référents non-élus désignés par le Maire, pourront-ils être des intermédiaires efficaces et objectifs entre l’exécutif et les citoyens s’ils ne viennent pas à l’écoute des habitants, voire pire encore, si les problèmes concrets ne sont jamais évoqués faute d’assemblées représentatives qui seules sauraient en porter témoignages ?

Comment peut-on avoir la garantie d’un traitement équitable des quartiers, si la sensibilité électorale ou les « amis » qui y résident, conditionnent l’attention portée à la résolution des problèmes ? Ce biais est déjà engagé, quand on observe la manière discriminatoire dont sont traités les problèmes d’assainissement, d’entretien des voiries, les refus de permis de construire, ou l’application parcimonieuse des pouvoirs de police du maire ! Les exemples de la voiture ventouse  de la rue du Château, du « mur tagué » heureusement valorisé par les enfants d’Octobre Rose, de l’absence de sanctions pour ceux qui ont dégradé la fontaine de la place de l’Eglise sont assez évocateurs.

« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » disait La Fontaine.

N’y-a-t-il pas là une simple mascarade visant à se contenter de développer des signes extérieurs de démocratie participative ?
Le bon fonctionnement des comités de quartiers suppose une totale transparence, une ouverture des réunions à tous et la liberté de parole à tout citoyen relevant du périmètre d’un quartier. Il suppose enfin que les problèmes qui sont révélés dans un quartier, les revendications qui émanent d’un collectif de quartier, ne restent pas lettre morte mais fassent l’objet d’un suivi et soient pris en considération par l’exécutif sans aucune discrimination locale. Rien n’est pire qu’une pseudo démocratie participative de façade tentant vainement de dissimuler le fonctionnement seigneurial d’une commune.
Si cette dérive n’est pas rapidement corrigée, les réunions des référents de quartiers et l’information « officielle » qui en sera diffusée, risquent d’être la réplique du fonctionnement des comités éditoriaux du 19e siècle, si bien décrits dans les Illusions perdues d’Honoré de Balzac !
Dépourvus d’objectivité, manipulant l’opinion publique au bon vouloir des réseaux d’influences. Séduire plutôt qu’instruire. Parler plutôt que discuter.

Concrètement et ouvertement, le Blog de St Georges invite tous les citoyens à apprécier l’outil de suivi des actions mis en place sur sa page spéciale "Quartiers". Plus de 35 actions ou idées y sont déjà enregistrées. Cliquez ici.

Pour mémoire, retrouvez l'article LE PROGRES du 16/03/2021 "La consultation citoyenne sur l’avenir du foyer municipal n’aboutit pas".